

Permaculture, mais c’est quoi la permaculture ?
Permaculture, mais c’est quoi la permaculture ?
La permaculture est un principe global de culture qui se base entre autres sur l’écologie naturelle. Il s’agit d’une méthode dynamique, car le permaculteur va observer l’écosystème avant d’appliquer des méthodes de culture qui seront donc adaptées à cet écosystème et à sa biodiversité.
Le but affiché est une agriculture durable, qui respecte le sol et ce qui y vit tout autant que celui qui y travaille. La permaculture est en effet peu énergivore, autant en terme de travail que de l’utilisation d’énergies non renouvelables.
Les origines de la permaculture
C’est un agriculteur japonais qui a inspiré la théorie de la permaculture. Masanobu Fukuoka était un microbiologiste, chercheur en pathologies des végétaux, qui a tourné le dos à l’agriculture dite scientifique et productiviste (basée sur les engrais, les pesticides et le travail du sol) pour pratiquer une “agriculture naturelle”. Dans sa ferme il a fait des recherches pour minimiser autant que possible le travail de l’homme et réunifier celui-ci avec la terre qui le nourrit. Il y montre qu’il obtient par ses méthodes une meilleure productivité qu’avec l’agriculture conventionnelle.
Il a commencé à être connu (et reconnu) dans les années 1980 et a réalisé de nombreuses conférences tout autour du monde ainsi que de nombreux échanges et visites de sa ferme.
La théorie de la permaculture a été pensée dans les années 1970 par deux australiens, Bill Mollison et David Holmgren d’après les travaux de Masanobu Fukuoka, mais pas seulement. Ils se sont aussi basés sur des travaux écologiques, d’aménagement…, mais toujours dans le but de lutter contre l’agriculture intensive qui abîme voire détruit les sols.
La permaculture est plus “active” que l’agriculture naturelle prônée par Masanobu. Pour autant, elle inclut elle aussi des principes philosophiques et éthiques. La permaculture a également une portée holistique, globale, dans le sens où elle vise à la création de sociétés humaines durables via la création par chacun de son propre environnement (production de nourriture, d’énergie, d’habitat…) durable et autonome mais connecté aux autres. C’est pourquoi il ne s’agit pas seulement d’agriculture permanente mais de culture permanente.
Bill Mollison et David Holmgren ont enseigné leur théorie à de nombreux étudiants, qui sont devenus eux-mêmes des formateurs dès le milieu des années 1980, entraînant la formation d’écoles, d’associations et autres groupements de permaculture.
Le saviez-vous ? Le terme de “permaculture” a pour origine la “permanent agriculture” dont parle le premier Cyril G. Hopkins, un agronome américain. L’agriculture permanente est une agriculture qui permet de conserver la fertilité et la richesse de la terre.
Les principes de la permaculture
Voici les principes éthiques de la permaculture, définis dans L’essence de la permaculture de David Holmgren, l’un de ses fondateurs :
“Prendre soin de la terre (les sols, les forêts et l’eau)
Prendre soin de l’humain (soi-même, ses proches et la communauté)
Partager équitablement (limiter la consommation et la reproduction, redistribuer les surplus)”.
L’agriculture et le jardinage ne sont donc que quelques-unes des applications de la permaculture.
On y réalise généralement des cultures biologiques car sans intrant chimique et avec un mot d’ordre : la “soutenabilité énergétique”. Dans la permaculture on y utilise le moins possible d’énergies non renouvelables, et le moins possible d’énergie de travail. Les outils motorisés n’y sont pas les bienvenus, remplacés si nécessaire par la traction animale ou par des outils à main étudiés pour préserver au mieux le sol : aéro-fourche (grelinettes et autres), sarcloirs oscillants, cultivateur à roue… L’eau est récupérée et les semences sont produites sur place à partir des cultures précédentes.
On va y imiter les écosystèmes naturels qui sont considérés comme plus efficaces que les systèmes humains. La forêt est l’un des principaux modèles, qui a donné naissance à l’agroforesterie. L’humus que l’on y trouve en quantité est le graal du permaculteur. Celui-ci va limiter le travail du sol pour protéger la pédofaune et le complexe argilo-humique. Il va également veiller à garder le sol toujours couvert grâce à un paillage permanent composé de matériaux divers : paille, feuilles… Cette couverture limite le tassement et l’érosion des sols. Elle nourrit le sol qui va nourrir la plante. La terre est ainsi préservée et vivante et n’a plus besoin d’être travaillée car la pédofaune le fait à la place du cultivateur.
La permaculture se montre l’opposé des monocultures intensives. On y multiplie les espèces végétales pour conserver une bonne diversité. Un large choix de variétés de la même espèce permet également des récoltes étalées dans le temps. La permaculture accorde beaucoup de place aux plantes potagères pérennes ou perpétuelles : elles se multiplient seules, ne demandant pas de travail au jardinier durant des années une fois qu’elles sont plantées. La conservation d’une zone sauvage est elle aussi le gage d’une biodiversité importante. Les végétaux sont rarement installés en lignes par genre, ils sont plutôt mêlés pour utiliser au mieux les associations de plantes et limiter la circulation des organismes pathogènes. Plantés plus serrés, ils couvrent mieux le sol, installés à la verticale ils fournissent l’ombre nécessaire à leurs voisins.
On y utilise les animaux d’élevage qui vont contribuer au système : poules, canards, chevaux, bovins, moutons… Les poules par exemple se nourrissent de limaces, de chenilles, limitent la pousse des adventices, fournissent du guano qui nourrit le sol, donnent des œufs…
À savoir : on voit souvent le mot “design” associé à la permaculture. Cette désignation s’explique par le réel rôle de créateur d’un espace que peut avoir le permaculteur, de la conception originale à la réalisation, puis à la maintenance du projet et à sa réévaluation si besoin.

Permaculture : préparer le sol
Permaculture : préparer le sol
Masanobu Fukuoka dit dans son livre “répandre de la paille... est le fondement de ma méthode pour faire pousser le riz et les céréales d'hiver. C'est en relation avec tout, avec la fertilité, la germination, les mauvaises herbes, la protection contre les moineaux, l'irrigation. Concrètement et théoriquement, l'utilisation de la paille en agriculture est un point crucial. ”
Cette liste de méthodes est non exhaustive et toutes ne s’appliqueront pas forcément à votre situation. Observez, testez sur de petites surfaces avant de transformer toutes vos planches !!!
Préparer mais sans travailler !
Préparer le sol en permaculture c’est ne pas le travailler : travailler moins pour récolter plus, telle est la devise du permaculteur !
En effet, les 10 premiers centimètres de terre contiennent une pédofaune nombreuse, qui a beaucoup d’influence sur le sol en lui-même et sur les végétaux qui y poussent :
Les vers de terre aèrent la terre et l’ameublissent mais ils ne sont pas les seuls : les fourmis, les collemboles, les mille-pattes... brassent continuellement la surface du sol ou un peu plus en profondeur, en fonction des espèces.
De nombreux insectes et organismes décomposent la matière organique qui servira à nourrir les cultures : les protozoaires, bactéries, champignons, nématodes, les collemboles et vers de terre, les cloportes, les acariens, mille-pattes...
Les champignons mycorhiziens permettent aux végétaux de se nourrir au mieux des nutriments et de l’eau contenus dans le sol. Ils ont également un rôle important dans la stabilisation des sols.
Aéré, riche et stable, le sol laisse bien circuler l’eau sans pour autant être sensible au ruissellement et à l’érosion et les plantations ont moins besoin d’être arrosées. Cette stabilité limite également le phénomène de battance qui se produit lors des fortes pluies. Les multiples galeries qui le parcourent laissent également circuler l’oxygène nécessaire aux racines et celles-ci se développent plus facilement. Ce sont tous ces organismes et insectes qui travaillent le sol à votre place !
Mais il arrive fréquemment que la terre ne soit ni meuble ni très vivante dans les jardins, alors comment fait-on pour préparer le sol en permaculture afin de faciliter les cultures ? Les méthodes sont très variées puisqu’elles font corps avec le jardin, son environnement et son jardinier ! Les cultures se font souvent au-dessus du sol, mais d’autres techniques permettent d’améliorer plus ou moins rapidement la terre de son jardin.
Quelques constantes :
Ne jamais laisser un sol nu : vous pouvez utiliser tous les déchets du jardin : rameaux, broyat, paille, foin, déchets de tonte, fumier, feuilles mortes… ou bien semer des engrais verts.
Ne jamais enterrer la matière organique : sans oxygène, pas de décomposition car la plupart des organismes décomposeurs sont aérobies.
Ne jamais travailler le sol. On peut à la rigueur l’aérer à l’aide d’une grelinette bien que ce ne soit pas conseillé dès lors que l’on veut respecter au maximum la pédofaune, et plus particulièrement les vers de terre qui n’apprécient pas trop que l’on vienne détruire ainsi leurs galeries. Si vous voulez quand même aérer votre terre, n’allez pas en-dessous de 5 cm. Bien sûr l’installation d’un potager en permaculture demande au départ l’utilisation d’outils, tant que le travail d’ameublissement du sol n’est pas assuré par les “travailleurs de l’ombre”, mais sélectionnez les outils les plus respectueux de la vie du sol.
Ne jamais apporter d’engrais et autres produits chimiques. Ils déséquilibrent les sols, apportent des nutriments en excès et ceux-ci, non utilisés, sont lessivés et finissent dans les nappes phréatiques.
Travaillez avec les vivants qui pratiquent votre jardin au lieu de les combattre, la biodiversité apporte un équilibre qui va limiter de lui-même la présence des ravageurs.
Installez des haies naturelles qui ont un rôle majeur pour la protection de la faune, pour lutter contre l’érosion.
Quelques méthodes de préparation du sol
Le "mulch"cette méthode est la plus simple à réaliser et elle demande moins de matières que les suivantes. Elle se réalise sur n’importe quel sol enherbé et permet de lancer un potager facilement. Vous pourrez par la suite passer à une autre méthode plus “travaillée”. Vous allez préparer une bande en rassemblant sur 20 cm d’épaisseur des matières organiques variées, selon ce dont vous disposez : feuilles mortes, paille, foin...
Ce mulch doit être déposé durant l’hiver, pas trop tôt pour qu’il en reste suffisamment au début du printemps pour tenir l’endroit désherbé. Au moment des plantations et semis, vous pourrez les faire directement dans le sol sous le mulch.
La bonne couverture au bon moment pour un sol riche
Un travail intensif des micro-organismes du sol libère les composés minéraux simples de la matière organique. Cela s’appelle la minéralisation. L’azote est l’un de ces éléments, qui est sous forme de nitrates lorsqu’il est issu de ce processus. Or, lorsque le sol est nu, ces nitrates ne profitent à personne, ils sont lessivés par les pluies et polluent les nappes phréatiques.
C’est en automne que cette minéralisation est la plus importante, car le sol est encore chaud et humide des pluies habituelles à cette saison, ce qui stimule la vie et l’activité dans le sol. L’automne est également une saison où les cultures sont nettement moins nombreuses, laissant le sol libre et donc une perte importante des nitrates disponibles dans le sol à ce moment là. Au printemps, par contre, du fait du froid, la minéralisation est très lente, l’azote nécessaire à la croissance des végétaux doit être apporté en plus.
Pour éviter ce gâchis, il faut imiter la nature comme le préconisent les principes de la permaculture
En automne, les feuilles tombent : riches en carbone, elles vont avoir besoin de beaucoup d’azote pour se décomposer. Ça tombe bien, le sol en est gorgé ! C’est donc le moment d’apporter des matières carbonées : feuilles sèches bien sûr, paille, voire branchages fins… Et/ou de semer des engrais verts (crucifères) ou des cultures d’hiver qui profiteront de cet azote pour se développer.
En fin d’hiver, les herbacées plus ou moins détruites par le froid se décomposent, fournissant beaucoup d’azote et d’autres éléments nutritifs que leurs racines ont été chercher dans les profondeurs du sol. À cette période, vous apporterez plutôt des déchets de tonte et du compost de fumier qui fourniront des nitrates pour nourrir les plantations prochaines, ou bien des légumineuses qui fixent l’azote de l’air.
À savoir : les légumineuses sont réputées pour l’apport en azote qu’elles offrent au sol. Mais ce processus n’est pas direct, ce n’est que lors de la décomposition de leurs feuilles, tiges et surtout racines que l’azote atmosphérique qu’elles ont fixé va revenir au sol. Là, une fois transformé en nitrates lors du processus de minéralisation par les bactéries, cet azote sera disponible pour les cultures.

Le calendrier du sol en permaculture
Le calendrier du sol en permaculture
L’hiver
En hiver, vous pouvez préparer de nouvelles surfaces pour vos plantations en déposant une bonne vingtaine de centimètres de mulch (paille notamment mais aussi feuilles mortes, broyat...) directement sur le sol non désherbé ni travaillé. Vous pouvez aussi pailler le pied de vos arbres et arbustes afin d’y maintenir un sol plein de vie.
Janvier : étalez du compost sur vos planches vides, qui pourra se dégrader durant l’hiver et nourrir ainsi vos futures plantations. De plus, il maintiendra un peu de chaleur dans le sol. Vous pouvez commencer à faucher les engrais verts semés en automne comme la phacélie.
Février : en terre non argileuse, vous pouvez éventuellement “greliner” vos planches. Si vous ne l’avez pas fait en janvier, apportez du compost au potager et dans vos massifs.
Mars : finissez de faucher les engrais verts afin qu’ils aient le temps de se décomposer avant les semis de printemps.
Le printemps
En mars-avril, semez des engrais verts à croissance rapide comme la phacélie ou la moutarde blanche sur les planches prévues pour les légumes gourmands comme les cucurbitacées qui ne seront installées qu’en mai ou en juin.
Dès les premières tontes, récupérez les déchets et utilisez-les comme paillage au potager et au pied des vivaces et arbustes. Les graminées se décomposent rapidement et fournissent notamment de l’azote au sol.
L’été
Au fur et à mesure où vos planches se vident, semez des engrais verts à la place. Laissez les racines des plantes potagères en place ainsi que leurs tiges et tout ce qui n’est pas récolté. Il vous faut juste hacher très grossièrement tout cela pour faciliter le travail de la pédofaune.
L’automne
C’est la période pour apporter au sol des matières à bonne teneur en carbone comme les feuilles sèches, des branchages, de la paille…
Pour ceux qui n’ont pas totalement éliminé le travail du sol, un passage de grelinette peut être effectué dans les terres argileuses, le gel participera ensuite à briser les mottes. Le sol sera couvert tout de suite après.
Paillage et couverture
Couvrir le sol est toujours un geste bénéfique : il limite les conséquences d’avanies climatiques comme les épisodes de sécheresse, des baisses brutales de température ou des fortes pluies, il limite l’évaporation, il apporte des éléments nutritifs lorsque la couverture se décompose, il évite le développement trop important des plantes indésirables.
Les matériaux
Le BRF : le Bois Raméal Fragmenté est constitué d’un broyat de jeunes rameaux d’arbres (moins de 2 ans). Les branches ne doivent pas faire plus de 7 cm de diamètre. Pourquoi doit-on choisir de jeunes branches ? Eh bien tout simplement parce qu’elles sont extrêmement riches en minéraux, acides aminés etc, puisqu’elles sont en pleine croissance. La couche doit être fine, entre 1 et 6 cm selon que la terre soit lourde ou au contraire plus légère.
La paille : plus riche en cellulose qu’en azote, elle est très longue à se dégrader. Elle est perméable à l’air et à l’eau mais beaucoup moins aux adventices.
Les feuilles mortes : c’est l’une des couvertures les plus “naturelles” qui soit. Riches en carbone, elles se décomposent assez lentement sauf si vous les mélangez avec des tontes de gazon qui doperont l’activité des décomposeurs. Une bonne méthode est de les étaler sur l’herbe et de les tondre avant de ramasser le tout.
Les tontes de gazon : il est préférable de les mêler à d’autres déchets car leur finesse fait une couche peu perméable, étouffante.
Le foin, les déchets verts du jardin : perméables à l’air et à l’eau, ils se décomposent rapidement et apportent beaucoup d’éléments nutritifs.
Les engrais verts
Vous sèmerez des espèces différentes selon la saison et le mieux est de choisir des mélanges pour obtenir des bénéfices variés : mêlez des légumineuses (féveroles, vesce, pois, trèfle), pour l’azote qu’elles offrent, aux crucifères (moutarde, colza, navette) dont les racines puissantes aèrent le sol, aux graminées (seigle, avoine) et aux mellifères (phacélie) qui attirent nombre d’insectes pollinisateurs. On utilise aussi comme engrais vert le sarrasin, qui est un efficace désherbant, et l’épinard. Le seigle, les trèfles et la phacélie produisent de l’humus lors de leur dégradation.
Une fois fauchées avant la floraison, vous les laisserez au sol, elles ne doivent pas être enfouies.
Au printemps, elles doivent avoir un cycle rapide pour laisser la place aux cultures prochaines. Les légumineuses sont généralement privilégiées du fait de leur apport en azote. Les épinards ont le double avantage de couvrir le sol rapidement, laissant la place aux légumes d’été, et d’être consommés. Les pois, vesce, avoine seront préférés avant des semis de légumes d’hiver tels que les carottes, les panais, les choux, les poireaux qui ne seront pas installés avant le mois de juin.
En été, après avoir récolté des fèves, des pommes de terre, vous pourrez semer du sarrasin, de la moutarde, du colza, de la vesce ou encore de l’avoine.
En automne, vous sèmerez de la moutarde (en septembre), ou bien de la vesce et du seigle, très rustiques, pour rester en place de longs mois, jusqu’aux cultures de légumes d’été.
Vous pouvez aussi profiter des bénéfices des engrais verts pour un couvert permanent, par exemple au pied de vos arbres : le trèfle, la luzerne...
La promesse d’une exploitation durable et respectueuse de la nature, alliée à un moindre travail du jardinier-permaculteur, a de quoi attirer un grand nombre d’amateurs de jardinage. Pour autant, c’est au niveau de la modification des habitudes et même des modes de penser que la permaculture demande un travail important, mais plus sur soi-même que sur le sol du potager !! Car il faut tout simplement cesser de vouloir contraindre, maîtriser, aligner, pour laisser aller une spontanéité bien plus naturelle. Préparer le sol en permaculture, c’est enfin laisser parler la nature qui est autour de nous.